Ma mère est pédophile. Elle a abusé de moi, son fils.

Je m’appelle M., 39 ans, j’ai été élevé dans une famille bourgeoise et notable d’une petite ville de province et je suis une victime de l’inceste.

Aujourd’hui, je vais bien et même si le chemin vers l’apaisement et la guérison est encore en cours. Je me bats pour vivre comme et parmi tout le monde.

Je suis sorti du déni à 34 ans, après 8 ans de soins psy et 4 de corporels, initialement entamés pour un mal être profond indéfini et des « maux » de corps. Jamais je n’aurais imaginé que l’origine principale de cette souffrance était due au fait que ma mère avait abusé de moi, avant mes 4 ans.

J’ai mis du temps à accepter cette vérité sur l’inceste, à me dire que je n’étais pas fou, que ces images horribles qui dégueulaient de moi, en flashs, en cauchemars, sur le visage de femmes, n’étaient pas imaginaires, mais malheureusement bien réelles, simplement des souvenirs enfouis de mon enfance. Cette femme, ma mère, avait assouvi ses pulsions sexuelles avec moi, son bébé.

Tout paraissait tellement logique et me permettait de comprendre plusieurs de mes questionnements : pourquoi j’avais peur des femmes ; pourquoi j’avais peur d’être un homme ; pourquoi je refusais le plaisir ; pourquoi j’étais solitude ; pourquoi j’avais un corps en morceaux, indolore ; pourquoi je ne m’aime pas ; pourquoi je me sens différent ; pourquoi je suis en rage lorsqu’un enfant se fait disputer par un adulte ; pourquoi je souffre depuis si longtemps… dans le silence, dans la culpabilité.

J’ai été traversé par la colère, la rage, le dégoût mais j’ai également ressenti une forme de soulagement. Pour la 1ere fois de ma vie, je comprenais que, ce mal intérieur, n’était pas de ma faute, de ma responsabilité !

J’ai décidé de briser cette loi du silence, du mensonge, et de mettre chacun face à ses responsabilités. Il fallait vider mon être de ce mal, fait au nom de l’amour (et non par amour) par mes géniteurs, et leur rendre.

Les faits furent exposés et… Ils n’eurent aucune réaction, aucun mot, rien… Aucun signe «humain» suite à de tels propos d’un fils à ses parents ! Rien, enfin devant moi… Quelques heures plus tard, ma mère ordonna à la famille de ne plus me parler, sous prétexte que je faisais partie d’une secte, que j’étais manipulé. La famille acquiesça ! La loi du silence doit être respectée.

Aujourd’hui, je ne suis plus une victime, je suis un survivant. Je veux être bien et personne ne m’arrêtera. Je l’ai promis à mon enfant intérieur.

 

Illustration : Dominic Liam