L’inceste, le 1er jour du reste de ma vie.
De toute façon il ne s’est rien passé, ce jour-là. 
L’enfant est mort, l’homme a 43 ans aujourd’hui.
Depuis que l’enfant est mort, il vit en dehors de sa vie.
Un survivant parmi les vivants, un dissocié parmi les associés.

Attaqué, creusé, arraché et puis émietté par une sœur perverse narcissique âgée de 14 ans, à l’époque.

Moi, j’avais entre 5 et 6 ans, lorsque le chaos s’est engouffré dans ma petite vie.

3 ans… ; 3 années de calvaires, d’humiliations, de soumissions et de manipulations.

Il a fallu s’adapter, se dissocier, se perdre dans les méandres de ta jouissance corporelle.

Moi, l’enfant sans corps et sans conscience rationnelle.

Tu m’as culpabilisé, tu m’as reproché de ne pas pouvoir te satisfaire, car mon sexe était trop petit. Je me souviens.

Tu ne pouvais pas me faire de fellation et je ne pouvais pas te pénétrer. Cela te mettait en colère, et moi je te priais d’attendre, car lorsque je serai Grand, à ce moment-là, je pourrai te satisfaire.

Donc, en attendant, comme tu me disais, occupe-toi de moi, Viens ici, dépêche-toi ! 
Tu as tout utilisé de moi, mon corps, sur lequel tu te frottais, ma bouche avec laquelle tu jouissais.

L’oubli et le secret dans lesquels tu m’as plongé, m’ont renforcé et condamné à la solitude, à l’irrationnel.

Ta maladie et ton besoin d’«effracter», de percer, de déchirer, m’ont englouti et associé à un piège dont il était impossible pour moi de m’extraire.

La réactualisation, la répétition, la reviviscence du traumatisme, jusque-là vécu comme honteusement caché et tu, ou encore inaccessible par la mémoire, peut être aujourd’hui, pour moi, l’amorce ou l’occasion d’un travail permettant de sortir de la paralysie totale.

Mais voilà, aujourd’hui, je me donne la force de la regarder et de la montrer ; mon histoire, ton histoire… Notre Histoire.

Cette déchirure comme un arrachement de la peau humaine et de la chair, cette histoire de destruction de l’Être, cette pourriture de l’Âme, que tu as semée à l’intérieur de moi.

Aujourd’hui je la raconte, je me la raconte, comme si la vérité était beaucoup trop belle pour pouvoir la supporter.

Mais aujourd’hui, je sais.

Je suis parvenu à atteindre ce calme qui me permet de m’affirmer respectueusement avec moi- même et surtout avec tes semblables : Les Femmes.

Le jour où je me suis aimé pour de vrai, mon cœur voulait rétablir la vérité, ma raison, mon gardien tant aimé, à l’intérieur de moi, ne s’en empêchait, et alors, j’ai pu me délivrer.

Aujourd’hui je sais, que ça s’appelle AIMER.

Lotfi