logo3Depuis 2003, à Paris, l’association Gynépsy accueille, écoute et oriente toute femme en souffrance psychique, ainsi que quelques hommes qui le souhaitent. Cette consultation est non-payante. La personne est reçue par un(e) psychanalyste. Elle est ensuite, si nécessaire, orientée vers l’endroit où sa question sera traitée au mieux, et ceci dans les domaines médical, juridique et « psy ».

Voici 4 questions posées à l’un des 2 fondateurs de Gynépsy, Jean-Michel LOUKA, psychanalyste, qui a eu la gentillesse d’y répondre et qui a proposé de mettre la Génération qui parle en visibilité sur le site de l’association Gynépsy. Merci !


Pourquoi avez-vous décidé de créer Gynéspy ?

J’ai décidé de créer Gynépsy après avoir constaté durant plusieurs années, dans un grand hôpital public parisien où j’étais, comme psychanalyste, « Attaché » au service de chirurgie gynécologique et sénologique, comment étaient abordés tous les abus sexuels, viols et autres violences de toutes sortes, dont avaient été victimes les femmes et les jeunes filles, patientes de ce service.
Tout y était abordé dans le silence, la parole subjective était écrasée ou détournée, seule la réponse médicale matérielle prévalait. Aucune écoute du sujet femme n’était de mise, il fallait « oublier », tel était le mot d’ordre.
Lorsque j’ai repris ma liberté de parole en partant de ce service, je me suis promis de fonder cette association, «GYNÉPSY» pour venir en aide aux femmes que l’on faisait taire, pour leur redonner la parole, leur parole dérangeante de femme.

Parmi les personnes qui osent pousser la porte de votre association, combien sont concernées par des violences sexuelles subies durant l’enfance ?

Aujourd’hui, s’adressent à Gynépsy des femmes… mais depuis quelque temps, aussi, quelques hommes. Parmi les femmes, je dirais que 80% sont concernées par des violences sexuelles subies dans l’enfance ou depuis l’enfance. Quand nous avons pris contact, vous avez partagé avec moi à quel point il était important, nécessaire, d’avoir à « passer » par la parole : « Parler à la place de se taire et de souffrir ».

En quelques mots, pouvez-vous expliquer les bienfaits qu’il y a, pour soi et pour son entourage, à s’accorder le droit de dire ?

L’être humain est un être de parole. Il ne se réduit nullement à son corps biologique, qu’il partage avec les animaux et spécialement les mammifères. L’être humain est, au moins, autant constitué de paroles que de cellules biologiques. Les expériences faites depuis longtemps avec des petits enfants, bien nourris, bien soignés, mais à qui on ne parle pas, se sont révélées catastrophiques, ravageantes, et peuvent entraîner la mort rapide. Ainsi, la parole est nécessaire à la vie. « Parler à la place de se taire et de souffrir » résume donc parfaitement la démarche et l’ambition de Gynépsy. Lorsque les Humains, comme les Etats se parlent, tout reste possible.
Si l’on se tait, le danger guette : violences, abus, manipulations, exploitations, guerres pour les Etats. En tant que thérapeute, vous êtes évidemment confronté à des personnes dont la mémoire traumatique s’est activée pour « oublier », au moins temporairement, les événements subis.

Que pensez-vous du fait que la loi aujourd’hui impose aux victimes de violences sexuelles subies durant l’enfance, une date limite pour obtenir réparation par la justice ?

Cette question de la date limite est aujourd’hui en débat. En tant que thérapeute, j’ai l’expérience qu’il faut, parfois, des années et des années, pour que ré-émergent les événements subis. C’est donc une question des plus délicates que d’imposer une limite, quelle qu’elle soit.