Devenir parent, avoir un accident de voiture, être cambriolé, être jury dans une affaire de viol, se faire arracher une dent… Les chocs émotionnels, positifs ou négatifs, qui nous permettent de faire remonter l’info au conscient, sont tous très différents.

Maintenant que je sais, je réalise que mon inconscient, que « JE » a essayé de nombreuses fois de me le dire mais qu’à ce moment là je n’ai pas vu, entendu, ce que je me disais à moi-même… Sans doute n’était-ce pas le moment… Il faut en effet être « solide » pour accueillir cette « information ». Evidemment, solidité ne veut pas dire ici, pour moi en tout cas, être inébranlable mais capable d’encaisser le choc, de ne pas mourir sur place (raison pour laquelle la « mémoire traumatique » était en position « ON » jusqu’à la prise de conscience).

Quand je suis devenue Maman, j’ai ressenti un bonheur immense évidemment ! Cependant, dans les jours qui ont suivi la naissance de mon fils, j’étais troublée… J’avais des espèces de flash, de « visions » où, toute éveillée, j’étais capable de « voir » comment on peut « abuser » d’un nouveau-né, idée qui ne m’avait jusqu’ici jamais traversé l’esprit… Wow ! Un nouveau-né ! Je me suis culpabilisée d’avoir de telles visions, j’étais folle pour être capable de m’imaginer de telles horreurs…
Pourtant, une fois, j’ai réussi à en parler à ma mère qui m’a dit « Oh c’est fou, quand tu es née, je faisais des rêves où un homme cherchait à abuser de toi sexuellement et je n’en ai jamais parlé à personne ». Nous nous sommes alors dit que c’était sans doute l’instinct de protection de maman qui s’était mis en route chez chacune de nous au moment où nous sommes devenues mères, pour protéger notre enfant, nous devions être capables d’imaginer le pire…
Sauf que, j’en ai parlé depuis à mes copines, devenues maman, tout le monde ne s’imagine pas ce genre d’horreur…

Douze ans après ces visions, j’ai compris, pourquoi je les avais eues et pourquoi ma mère avait fait ces rêves… Nous le « savions » et nous cherchions un moyen de nous le dire… Il faut du temps pour arriver à l’entendre et à y croire…

Ai-je des regrets de ne pas l’avoir « compris » au moment de la naissance de mon fils ?
A vrai dire, je ne pose pas vraiment la question, sans doute n’est-ce n’était-ce pas le moment pour moi. Evidement, à ce moment-là il n’y avait pas prescription et aujourd’hui je m’imagine à quel point ma vie serait totalement différente, cependant je respecte mon chemin de vie, c’est le mien et il est précieux.

Si je me l’étais révélé il y a 13 ans, je n’aurais pas décidé de mettre ce blog en ligne, alors quelqu’un d’autre l’aurait sans doute fait… et je n’aurais pas pu vivre cette expérience extraordinairement humaine (vos messages, vos témoignages sont puissants!) qui apporte sa petite pierre à l’édifice pour briser le silence !

Merci à tous, vous êtes la génération qui parle, que vous ayez subi des violences sexuelles ou pas, car ensemble désormais nous allons parler, dire stop, nous indigner… C’est ainsi que nous changerons l’avenir de nos enfants et des enfants de nos enfants !

Anne Lucie