Vanessa a été l’une des premières personnes à me faire part de son désir de témoigner. Son témoignage, publié le 11 janvier sous le titre La peur comme compagne, est à ce jour l’un des plus lu sur le blog.
Suite à la « métamorphose » que j’ai pu observer (sur la toile) dans l’attitude de Vanessa en seulement quelques jours, je dirais même presque en quelques heures, je lui ai demandé si elle voulait bien partager, avec vous, ce que le fait de témoigner lui avait apporté, persuadée que son expérience encouragera un grand nombre des lecteurs/trices du blog. Merci Vanessa !
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De tout ce que j’ai vécu enfant, du viol et des attouchements que l’on m’a fait subir, me restent la cristallisation de la peur, de la honte, l’habitude de me cacher, à l’intérieur de ma peau, de manière intrinsèque.

Il y a l’avant témoignage, toutes ces longues années à se soigner, toutes ces longues années à cacher que l’on a été violée, toutes ces longues années à composer au delà de soi, toutes ces longues années à oser le dire à sa meilleure amie, son amoureux, au Papa qui m’a élevée.
Lorsque j’ai décidé de témoigner sur le blog de La génération qui parle, je l’ai fait parce que l’information venait d’Andréa Bescond et que j’ai confiance en elle totalement, parce que son spectacle « Les chatouilles ou la danse de la colère« , parce que qui elle est, ce qu’elle a fait… tout cela est immense, immense pour toutes les victimes de viol, cette femme est immense et je ressens pour elle une reconnaissance et une gratitude sans fin.

Il était 7:00 du matin, un matin où ma fille était partie pour le collège et, d’un seul coup, j’ai eu besoin de mettre des mots sur la souffrance qui habite mon corps depuis l’enfance.

Je n’ai réfléchi à rien, mis à part que je demandais au départ à Anne Lucie, qui gère le blog de La génération qui parle, de témoigner de façon anonyme, par peur toujours, la petite Vanessa a toujours peur.

Puis sans réfléchir encore, comme une pulsion, lors de la même journée, aidée par l’écoute bienveillante d’Anne Lucie, les mots réconfortants d’Andréa, je dis à Anne Lucie, bien que ni l’une ni l’autre ne m’encourage à signer ou à être anonyme, je dis à Anne Lucie : « J’assume ! ».

J’assume mon témoignage ! Je suis d’accord pour que mon nom de baptême apparaisse. Je suis d’accord, j’assume ! J’ai ressenti une immense respiration dans mon cœur, une envie de pleurer et de me prendre dans les bras, moi, une envie de prendre soin de la petite Vanessa, de l’aider. J’ai ressenti que c’était juste, que j’avais le droit, que ce n’était pas moi la honte, aucunement moi la honte, mais l’autre, l’autre, le violeur. C’est lui qui doit avoir honte, c’est lui qui doit avoir peur, c’est lui qui doit flipper.

Je ressens aujourd’hui qu’à chaque fois que je fais un pas, dans l’échange de ce que j’ai vécu, c’est un pas de plus vers la guérison, c’est un pas de plus même pour aider d’autres victimes à libérer leur parole.

Ce qui reste douloureux, ce sont des personnes de ma famille qui ne me soutiennent pas, mais mon Papa qui m’a élevée me soutient, alors que c’est son neveu, de plus de 10 ans que moi, qui m’a violée, et la demi-sœur du violeur me soutient aussi.

Ce qui est douloureux, c’est que maintenant que je suis prête, il y a prescription et je n’aurai pas le droit de porter plainte. Ce qui est douloureux, c’est que cet homme a deux filles.

Grâce à La génération qui parle, grâce à mon témoignage, j’ai reçu du soutien de gens que je ne connais pas, j’ai reçu de la force pour continuer de parler. J’ai reçu de l’amour de manière inconditionnelle et pour la première fois, j’ai osé être moi, avec mon histoire.

Je me rends compte que parler est le début du combat, arrêter de se taire. Arrêtons de nous taire, donnons nous toutes et tous la main pour nous aider à y mettre les mots.

Je laisse à présent le temps à mon cœur et à mon corps pour la guérison mais ce témoignage est pour moi : salvateur, libération, espoir.
Je crois que le fait que certaines personnes aient entendu ma souffrance m’a donné la force de continuer et d’avoir envie de vivre et de créer.

Apprenez à vos enfants que leur corps leur appartient. Beaucoup de gens autour de moi se moquaient, lorsque mon enfant était bébé et que déjà je lui disais : « Ton corps n’appartient qu’à toi mon amour ».
Ma fille a 13 ans, ma fille connaît mon histoire, ma fille me trouve courageuse. Et moi je sais que ma fille sait se positionner, parler et se défendre.

Je souhaite continuer d’aider d’autres victimes. Je souhaite continuer de témoigner.
MERCI à La génération qui parle, merci, je ne serai plus jamais seule, MERCI.

Vanessa Aiffe Feschotte